Le nuit s'endort sur mon ancienne décennie...
Dans une minute, je bascule de l'autre côté du miroir.
Je ne serai plus dans l'approche mais bien dans le réel.
Je me laisse envahir par tout ce que j'ai pu recevoir depuis mes premiers instants.
Je parcours en savourant déjà tout ce futur qui se présente à moi.
Sensation
étrange et consciente de faire comme à la toute première respiration,
yeux grands ouverts, coeur entamé si palpitant, âme droite qui me
conduit à aimer toujours plus fort.
Quel plus beau cadeau que de s'offrir la vie à ses premiers balbutiements ?
Je vais m'absenter puis je reviendrai ailleurs...
Jeudi, j'emmène les enfants à l'école. Avant,
j'aurais pris la coquine Andréa, douce copine de Tom, je déposerai ma
Caillou avec un baiser très tendre, puis les deux diablotins.
Il me faudra revenir sur mes pas pour prendre un sac léger, juste de quoi partir en voyage 24 heures.
Je vais m'abandonner à une main guidante.
Et quand je me réveillerai, il n'y aura qu'une nuit avant de pouvoir repartir vers mon chez moi.
Je n'ai pas peur.
Je n'ai pas mal.
Je n'ai pas de choix à faire.
Je n'ai rien à perdre.
J'ai déjà tout gagné d'accepter d'être moi-même.
Vulnérable et puissante à l'unisson.
J'aime ce que je deviens et j'ai confiance.
Retombées nucléaires...
- Bombes.
- Dépôt de calcaire dans les canaux galactomachins.
- Partout.
- On s’active autour de vous pour ne jamais arriver au pire.
- Y’en a partout. (Mais
ça, je l’ai déjà dit. J’ai regardé hier soir attentivement les clichés. Ceux de
novembre. Ceux de mai. Et j’ai continué comme je faisais depuis deux heures, à
pleurer dans mon chez-moi toute seule, à me révolter contre ce que je voyais, à
repasser en boucle toutes les paroles pourtant rassurantes…)
- Pas de pronostic vital en jeu.
- « Ils sont très petits vos seins, ça vous
complexe ? Pas du tout ; je les aime beaucoup comme ça. C’est mon
côté collégienne qui prend le dessus. »
- Harpons.
- Repérage. Franchement, ça : c’est désagréable. (et quand un médecin
vous dit que cela va être désagréable, c’est que ça va franchement être
désagréable !)
- Vous vous faites accompagner et vous venez direct ici. (pas de problème, j’ai
un bon taxi).
- Ensuite, j’en fais mon affaire. Et le lendemain vous
ressortez.
- Je me débrouille pour que l’on ait les résultats le plus
vite possible.
- Dans 90 % des cas, c’est bénin.
- Chaque année, surveillance : On peut prévoir de mettre une fermeture éclair, ça ira plus vite et plus rigolo !
Et droit dans les yeux, le type me dit :
- Bon, sinon, je vais être direct : si c’est précancéreux,
on enlève tout le sein. Y’en a partout (encore
redit) et comme vous êtes jeunes (hé !
hé ! hé !), on ne va pas aller à l’économie. On vous reconstruit
après, en plus gros même si vous le voulez… Et on n’en parle plus !
J’ai bien accroché avec ce chirurgien. Clair, net, précis, un peu d’humour, réaliste, ne passant pas par quatre chemins. Surtout : droit dans les yeux (ça aussi, je l’ai déjà dit) toute la consultation. Ne perdant pas un millimètre de mes réactions. Et hier quand j’étais au fond du gouffre, je me suis dit : «ça t’apprendra à ouvrir tes yeux immenses, à écouter et tout prendre des paroles, comme si tu étais the most méga-super-hyper-fantastoche-woman in the world ! Le mec, il t’a tout dit, même ce que tu ne voulais pas entendre…»
Au pire, ou au mieux, qu’en sais-je véritablement maintenant, il me laissera ou me refera mes jolis seins.
Ensuite, j’ai bu de la vodka avec du jus d’orange, mangé des pains au raisin, regardé le match de foot, fait du tricotin en écoutant le concours de Monaco (des pianistes de fou jouant du Tchaïkovski ou du Rachmaninov, du délire, comment font-ils ?) et je suis allée dormir sans penser à rien.
Et puis hier, au fur et à mesure de la journée, mon esprit a commencé à ressurgir.
Et vers 18 heures, je n’étais plus qu’une grande marée. Avec des sanglots par wagon, des larmes à me faire exploser les paupières trop tendues de tout ce flot.
Lâche prise.
Ne retiens rien…
Donc, je me laisse aller dans ce tourbillon paradoxal. A ne faire qu’avancer jour après jour, avec mes peurs, mes joies, mes ambivalences, mes élans. Je ne peux pas décider pour moi à cet instant. C’est d’autres qui vont s’en charger. Parce qu’après tout quel serait mon choix ?
D’en finir le plus vite possible avec tout ça, tourner la page et voir d’autres paysages. Et c’est là le plus invraisemblable : c’est que ce choix pourrait bien aller à l’encontre de mon apparence, si je devais le décider. Pour ne plus recommencer ces mêmes attentes, ces questions identiques, cette spirale infernale.
J’ai l’impression pourtant d’avoir payé mon tribu de tout cela. Mais ce pourrait-il que mon inconscient en ait décidé autrement ? Aller jusqu’au bout d’un processus largement entamé pour changé totalement de vie… Va savoir !
Ce soir, mes enfants sont là. Ils dorment paisiblement dans leur chambre, ensemble. Quand je suis allée les chercher chez leur père, je ne me suis mise aucun masque. Mais je n’ai pas attrapé le regard de leur Papa.
Nos retrouvailles ont été très douces, comme si je les avais quittés le matin même.
Et là, je suis à ma place exactement, ajustée au quart de ton près, comme une harmonique qui retentit sur son onde véritable.
Le temps avance, c’est comme ça.
Joyeux Anniversaire, Octave...
Il y a 18 ans exactement, tu venais au monde.
Maman, enfin Mamie Margot pour toi, m'avait téléphoné le 25 pour m'annoncer l'arrivée de ce premier petit fils !
OCTAVE...
J'ai donc décidé de te livrer des photos que j'ai gardé de toi tout au long de ta vie avançant.
Elles
n'y sont pas toutes, mais maintenant que tu es majeur et vacciné, tu
vas pouvoir venir me voir sans demander la permission à ta mère ;-)
Commençons par ce petit ange :
Tu avais six mois
C'était à Noël.
Le bambin à croquer !
Avec déjà dans le regard, une grande curiosité !
La première bougie
J'aime particulièrement cette photo.
Ce regard, donc... Celui de ta mère (ma soeur) sur toi, ou serait-ce la bouteille de Saint Emillon empoussiérée ?
L'été suivant
Le petit lutin dans le jardin de Mamie !
A mettre les mains partout...
On t'aurait bien mangé tout cru !
Quatre ans, j'en suis sûre !
La robe blanche, c'était la mienne à mon mariage.
Quand tu m'avais vue à la mairie, en robe de princesse, tu étais devenu tout rose d'intimidation.
Te rappelles-tu que nous avions ouvert le bal ensemble ?
Sept ans : âge de raison
Cette photo nous rappelle que nous sommes une tripoté maintenant à souffler nos bougies en début d'été !!!
Il semblerait que les petites filles échappent à la règle puisque Camille dormait à cet instant dans mon ventre...
Après le bon gâteau (génoise maison, attention, framboises du jardin et chantilly idem...), rigolade avec cette fameuse Mamie Margot...
Huit ans
Et voilà, tu as une cousine: et pas peu fier avec ça !
Il faut dire que tu as toujours eu, même très jeune, un sacré feeling avec les gnomes en herbe.
N'est-ce pas l'ami OctaBe ? Oui ToB...
Les heures passées dans le lit de Papi et Mamie. Moi aussi, à ton âge, j'adorais aller y lire le dimanche matin...
Cousin de 14 ans !
La clique des joyeux lurons s'est sacrément agrandie !
Camille, Stella ta soeur, Tom(B) et Gabinette...
Mais au fait, tu lui faisais quoi à Gaby pour qu'elle ait cette trombine ?
Seize ans, de la bouteille en plus...
Deux ans après, c'est immense.
On voit déjà un tout autre style !!!
Qu'est-ce que t'étais craquant avec tes cheveux longs.... (Presque autant que quand tu étais tout p'tit !)
En avril, cette année...
Elle m'amuse cette photo, on dirait pratiquement que la place vide attend le dernier de la tribu !
A ce jour, Papi et Mamie Anto peuvent être fier :
Un petit fils - Une petite fille
Une petite fille - Un petit fils
Une petite fille - Un petit fils.
Chouette !
Mon sein...
A l’automne dernier, tout avait été bouclé en trois
semaines.
L’image, le geste, le résultat rassurant.
Je garde à ce jour une toute petite marque à peine plus
foncée, comme une étoile, sur le galbe de mon sein gauche.
Cela avait été presque facile, emportée que j’étais dans ce
divorce débutant. Je n’avais pas lutté contre moi-même mais plutôt pour me
protéger d’un environnement très agressif à mon égard, ce qui m’avait alors
rendu un fier service : celui de mettre les voiles d’une manière encore
plus définitive et de tourner la page pour clore ce livre là.
A ce milieu de printemps, c’est avec insouciance que je suis
allée contrôler ce que j’ai appelé mes petits cristaux. Et le scénario n’a pas
été du tout celui que j’imaginais ! J’ai d’abord commencé par un acte
manqué évident puisque je me suis pointée sans l’image du mois de novembre.
Impossible donc de faire une comparaison. Puis, alors qu’une semaine venait de
s’écouler, je pensais que dans ma boite à lettres, il y aurait une grande
enveloppe avec le résultat… Et bien non, coup de fil…
« Je suis embêtée
car cela a augmenté de volume… J’ai peur que l’on soit passé à côté de quelques
choses il y a six mois… »
Impossible nouvelle : il fallait se réarmer pour
repartir dans un processus de diagnostic plus poussé.
Les phrases entendues qui ont tourné en rond (en mal ou en bien) dans mon esprit :
- Vous êtes jeune, 39
ans, avec une situation psychologique propice…
- On fera de toute
manière une chirurgie, quelque soit le résultat de l’anapath…
- Dans votre situation,
vous êtes extrêmement bien prise en charge, au tout début, il n’y aura donc pas
d’autre traitement…
- Côté « yeux
bleus », vos parents ont super bien œuvré, côté texture du sein à
l’intérieur : c’est merdique ! Mais on devrait pouvoir en faire quelque
chose… (Ça, c’était ma gynéco de choc, une chouette toubib !)
Alors par force et conviction, je me suis occupée de moi. Je
me suis dit que c’était une suspension imposée, sur mon temps d’évolution, qui allait
me conduire à un travail sur moi que je n’aurais pas fait aussi finement si je
n’avais pas été confrontée à cela.
J’ai ouvert un grand éventail sur toutes mes ramifications,
comme une sorte de peigne fin qui détermine toutes les sources de mon énergie,
ou encore comme des milliers de liens qui me sondent, me contiennent et me
réordonnent.
D’un point de vue très pragmatique, je ne suis effectivement plus inquiète. Car je sais que je suis très bien prise en charge et qu’ensuite, je ferai partie de ses femmes qui sont étroitement surveillées et bichonnées. Je le prends ainsi.
Mais au fond de moi, c’est une mêlée intense, entre ma raison, mes intuitions, mes convictions, ma sensibilité, l’image de moi, de ma féminité profonde. Tout cela s’oppose, se heurte, se fractionne, se liquéfie, se reconstitue.
Je m’aperçois que j’ai toléré des années durant d’avoir mon âme et mon cœur rabaissés, malmenés, violentés, tailladés, ignorés au risque d’avoir mon intérieur abîmé au plus haut point sans possibilité de « reconstruction » avec de larges cicatrices, et à ce jour, alors qu’il n’y a qu’une plastie en jeu, je suis morte de trouille et je ne veux pas que l’on me détériore davantage.
Mais je n’ai pas le choix : je dois gravir une à une toutes ces marches qui me conduisent du côté de la guérison, de la vie. Je dois continuer à être sage et disciplinée.
Et me servir de mes moteurs…
Mes enfants.
Ma musique.
Mes écrits.
Ma famille.
Mes amis.
Alors, ce n’est ni aujourd’hui ni demain ni même après, durant encore au moins quarante belles années je l’espère, que je vais arrêter d’écrire !!!
Et je trouve dans ce blog des ressources inattendues, dans le regard, le soutien de tous, dans ces rencontres étonnantes, somme toute, au pas de ma porte. C’est comme une grande spirale qui m’emmène vers l’extérieur où à l’identique, je peux puiser dans les êtres qui m’entourent de l’énergie pour rétablir mon bonheur de vie…
Merci...
Y’a des jours avec et des jours sans
Je me fais figure de bulldozer tant j’abas un à un les dossiers litigieux, je grappille de ci delà un peu plus d’autonomie, de responsabilité face à tout ce que je dois faire.
Je passe des heures au téléphone à aller droit au but et obtenir ce qui est bon pour moi. Tout se goupille à merveille.
Pourtant, ce matin j’ai mis un temps fou à démarrer. J’crois pas que j’ai vraiment mis le contact, en fait.
A l’ombre du salon de chez Valérie, tout à l’heure, j’étais bien de boire une menthe à l’eau, mais vidée et encore la trouille au bide.
« Tant que ce sera en toi et que tu ne sais pas ce que c’est, tu seras comme ça, Agnès… Patiente, dans quelques semaines tu pourras profiter réellement de ton été… »
En attendant, je marche plutôt à reculons. Je sais que je vais me faire tirer les oreilles par le chirurgien, parce que j’ai vraiment trop maigri.
Mais manger n’est ni une nécessité et encore moins un plaisir. C’est comme si je fonctionnais comme une machine qui n’a pas besoin d’être alimentée par autre chose que de la douceur dans mon esprit.
Je suis en quête d’apaisement et j’ai tellement peur au fond de moi que je préfère en devenir transparente.
J’ai réussi à aller à l’école de Tom pour aider les autres mamans à préparer la kermesse de ce soir.
Et là, je suis devant mon ordi à me dire qu’il va falloir que je mette la gomme sur le ravalement de façade tant mes yeux sont tristes.
Je vais devoir affronter ce moment avec les enfants d’un côté, et moi de l’autre, avec cette sorte d’interdit que leur père m’oppose de ne pas avoir droit de les voir puisque c’est sa semaine !!!
C’est ça qui m’écoeure : que ce type avec qui j’ai deux enfants soit en fait ce personnage lamentable et nauséabond. Je n’arrive pas à me nettoyer de ses bassesses.
P’t’être qu’un jour, si je lui mets mon point dans sa figure
de golden boy teenager sur le retard, ça me fera du bien. (Heureusement que je sais écrire ce genre de chose parce que du coup, je
réalise que ce n’est vraiment pas la solution de mettre les mains dans la m****…)
Bon, y’a presque plus de nuages dans le ciel. Il va faire un temps magnifique pour écouter les louloups chanter !
Et puis demain, le toubib va faire son job : me rassurer un peu plus :-((
Sacha...
Vite,
dans quelques minutes, il y aura déjà un jour sur l'état civil de passé !
J'avais écrit tout un long texte, sur mon agacement de ce jour, mes turpitudes,
mes états d'âmes, mes questions et tout le tralala.
Et puis, mon notificateur de mail qui me bave un
"maiçageuouaitineforeiou". Je regarde illico presto !
Regard attendri sur la photo du petit gnome : c'est un Sacha qui vient de rallier
le clan des Antoniewski.
Alors je suis contente.
Je peux bien reprendre le titre que je voulais mettre :
"Du bonheur, en veux-tu en voilà !"
Parce que ça, c'est de la bonne vie !