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Le blog de la quarantaine qui approche
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31 octobre 2004

« Agnès ? Voilà. Laurence est décédée ce matin,

« Agnès ? Voilà. Laurence est décédée ce matin, il y a deux heures. »

C’est fini. Elle ne respire plus. On va la ranger dans une boite en bois, on va la poser au fond d’un trou bien noir. On va refermer le tout et continuer la vie.

Moi, je n’irai pas à l’enterrement. Ce n’est pas de l’irrespect pour elle. Je ne veux pas voir le visage de ses proches, de ses filles. Je ne veux pas embrasser des joues inondées de larmes, je ne veux pas croiser des regards emplis de souffrance. J’accepte ma lâcheté face aux réactions de ceux-là. Parce que le plus dur, c’est bien pour ceux qui restent.

 

Ce n’est pas tant le temps qui passe, mais bien la mort qui est au bout qui me dérange, moi aussi. Tout à l’heure, j’avais collé les mômes dans le bain et je me suis installée dans le jardin, encore en pyjama. La chaise était glacée, comme le ciel gris laiteux qui nous recouvre aujourd’hui. Et j’ai pensé qu’il y a quelques années, j’aurais sans hésitation couru au devant de tous ceux qui l’ont entourée jusqu’au bout. J’aurais récupéré les pitchounettes, j’aurai proposé mon aide pour aménager leur nouvelle vie, je n’aurais pas pensé, je serais restée dans une certaine insouciance, parce qu’à moi, ça n’arrivera pas.

Aujourd’hui, j’ai gravi plusieurs marches et je me rapproche un peu plus de ce nouveau possible. L’approche de la quarantaine, c’est une nouvelle façon de voir que la vie passe encore plus vite que cela, et qu’il ne faut rien rater parce que demain, c’est banal, et tout peut s’arrêter. A cet âge, les parents des copains, ou les siens d’ailleurs, sont à des âges où le cancer crame tout sur son passage. Et ces papas-mamans, qui nous emmenaient à la foire aux plaisirs ou nous préparaient des chocolats chauds les soirs d’hiver, ces gens-là s’éteignent brutalement d’un arrêt cardiaque ou de longues maladies sans lendemain.

Et ça fait réfléchir tout cela. Surtout quand des têtes blondes buttent sur une leçon de grammaire à la noix et qu’elles ne comprennent pas pourquoi on ne prend pas le temps de jouer plus. Parce que demain, mon organisme jeune, jolie machine humaine, peut bien révéler une sacrée défaillance et déserter le monde d’ici-bas, sans avoir pour autant terminé ma tache la plus fantastique : amener mes enfants à l’âge adulte.

Alors, les boucles d’oreilles sont certainement très acérées, mais elles n’en restent pas moins des boucles d’oreilles, des objets, que je peux choisir de conserver dans une boîte ou tout simplement de jeter à la poubelle. Parce que de toute façon, ce matin, quand j’ai ouvert les yeux, j’ai vu le dos large de mon homme, qui dormait paisiblement, conférant à notre lit, une douceur d’être ensemble, à partager le quotidien et à se réveiller dans le même endroit.
Voilà. C'est encore les vacances. On a fait du feu dans la cheminée. On s'est levé très tard. On est tout décallé. Mais on est bien tous ensemble.

J’écris. Je continue. Demain, je recommencerai.

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Commentaires
P
... bien glauque en cette journée où le soir est venu trop vite.<br /> Profite du jour présent: les leçons de grammaire à la va-vite et ne pense pas à demain. La maladie sache le, ne regarde pas l'âge!
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