Jour de Noël
Ce matin là, dans le parc de mon enfance, les oies se
réunissaient. Elles tourbillonnaient autour de moi, avec leur chant
assourdissant. Il n'y avait personne, ou juste le bruit vague de la ville qui
se prépare à Noël.
J'étais dans un autre temps, presque sure que la valse des oiseaux m'était
secrètement dédiée.
Et puis il a fallu entasser les sacs et les cadeaux dans le train, pour
ressurgir brutalement dans la réalité du quotidien.
Sur le quai, une fraction de regard aura suffi pour que la nausée me revienne
au bord des lèvres.
J'ai une fois de plus revêtu ma carapace et surtout mon aplomb pour protéger
les enfants, leur offrir un moment de trêve.
Ce matin, il y avait des cadeaux. Des énormes pour le plus petit, des surprises
pour la plus grande.
Moi, j'ai eu mon lot... de médiocrité. Et j'aurais voulu que Camille soit
aveugle lorsqu'elle m'a tendu un paquet, déjà trop ravie que son père ait pu
penser malgré tout à sa mère... Mais elle a vu mon visage. Je me suis sentie si
dure en dedans, au milieu de mes mille morceaux...
Je sais bien que le Père Noël a dû faire un bond sur son traîneau de retour
quand il a entendu le bruit de mon coeur. Il n'a rien à se reprocher puisqu'il
a exaucé tous les voeux de mes anges. L'année prochaine, je lui laisserai le nouveau
reflet de ma vie, au fond de mes chaussons, et il sera rassuré du chemin que je parcours.
Parce qu'il y a plein de lumière sur mon nouvel envol.